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Traitement par cortisone de la maladie de Berger : nouvelles perspectives pour une histoire ancienne

La maladie de Berger (ou néphropathie à dépôts mésangiaux d’immunoglobuline A) est une maladie rénale caractérisée par une production anormale d’immunoglobulines A (IgA) au niveau intestinal. Ces IgA franchissent la barrière intestinale et passent dans la circulation sanguine pour finalement se déposer dans le rein où elles initient une réaction inflammatoire toxique.

Le recours à la cortisone en débat
La place de la cortisone dans le traitement de la maladie de Berger est reconnue au niveau international. Il est ainsi recommandé un traitement à fortes doses pendant une durée de 6 mois aux patients porteurs d’une maladie de Berger, présentant une protéinurie persistante à plus de 1 gr/jour et ayant une fonction rénale préservée ou faiblement altérée. 

Pour autant, le recours à la cortisone reste encore débattu, essentiellement en raison des effets secondaires induits par ces traitements à relativement fortes doses, mais aussi en raison d’une étude récente, STOP-IGAN, dont les résultats sont interprétés (à tort, il faut le préciser) comme en défaveur de l’utilisation de la cortisone.

Budésonide (Entocort), une formulation de cortisone qui réduirait les effets indésirables
Les résultats d’une étude européenne, NEFIGAN, tout juste publiés dans la prestigieuse revue LANCET, incitent à repenser la place de la cortisone dans cette maladie et pourraient réconcilier les partisans et les détracteurs de ce traitement.

Le concept évalué dans NEFIGAN est original : plutôt que d’utiliser la cortisone par voie générale (avec l’idée d’avoir un effet anti-inflammatoire au niveau du rein), il est proposé d’avoir recours à une formulation de cortisone qui agit localement au niveau de l’intestin (avec l’idée, ici, de bloquer la production intestinale anormale d’IgA et donc d’agir dès la première étape du processus conduisant à la maladie).

Cette formulation particulière de cortisone (BUDESONIDE, sous la forme de gélules gastro-résistantes, commercialisé en France sous le nom de ENTOCORT) est déjà utilisée pour le traitement de certaines maladies inflammatoires chroniques de l’intestin. Bien que non nul, le passage dans le sang est très faible et limite de manière importante les effets secondaires du traitement par cortisone.

Les résultats de l’étude Nefigan
Dans l’étude NEFIGAN, 149 patients atteints de maladie de Berger avec une protéinurie aux alentours de 1 gr/jour et une fonction rénale préservée ont reçu, en plus des mesures classiques de protection rénale (essentiellement, contrôle de la tension artérielle et régime alimentaire adapté), soit un traitement par BUDESONIDE (pour 99 patients) soit un traitement par PLACEBO (pour 50 patients) pour une durée de 9 mois.

Les résultats principaux de cette étude sont :

1. une diminution de l’ordre de 30% de la protéinurie pour les patients traités par BUDESONIDE

2. une stabilité de la fonction rénale de ces mêmes patients alors que pour ceux ayant reçu le PLACEBO, la fonction rénale se détériorait au cours des 12 mois de suivi.

Globalement, les effets secondaires liés à la prise de BUDESONIDE ont été modérés.

Une nouvelle approche thérapeutique en perspective ?
Ces résultats sont importants et indiscutablement en faveur du BUDESONIDE.

Il s’agit toutefois des tout premiers résultats concernant cette approche thérapeutique dans la maladie de Berger et plusieurs interrogations subsistent :

– est-ce que l’effet bénéfique sur la réduction de la protéinurie qui persiste au-delà des 3 mois suivant l’arrêt du traitement ?

– quelle est la durée optimale du traitement ?

– le traitement peut ou doit-il être répété dans le temps ?

– le traitement est-il efficace quelles que soient les lésions observées sur la biopsie, le niveau de fonction rénale, l’importance de la protéinurie ?…

Même si des études complémentaires sont nécessaires, ce traitement pourrait concerner dès à présent certains patients porteurs de maladie de Berger, d’autant que la spécialité ENTOCORT est disponible en pharmacie.
N’hésitez pas à en discuter avec votre néphrologue.

Pr Christophe MARIAT
Service de Néphrologie, Dialyse et Transplantation Rénale du CHU de Saint-Etienne
Membre du comité médical et scientifique de Renaloo

 

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