Clonage embryonnaire : La Grande-Bretagne se libère du tabou
26 août 2004, Le Quotidien du Médecin
L’autorité de régulation de la bioéthique britannique vient de permettre à une équipe de biologistes de réaliser le clonage d’embryons humains à des fins thérapeutiques.
LA GRANDE-BRETAGNE a décidé de braver le tabou du clonage en autorisant officiellement une équipe de biologistes de l’université de Newcastle à créer des embryons humains à des fins exclusivement thérapeutiques.
La Haute Autorité britannique chargée des activités d’assistance médicale à la procréation et à la recherche en embryologie (Hfea) a donné son feu vert au groupe spécialisé dans les recherches sur les cellules souches embryonnaires dirigé par le Dr Miodrag Stjokovic. Elle a appliqué une loi votée en février 2002 qui, pour la première fois dans le monde, autorisait la création, par clonage, d’embryons humains à des fins thérapeutiques, tout en criminalisant la pratique du clonage reproductif.
La loi britannique précise que les embryons clonés doivent être détruits au-delà d’un délai de 14 jours. Depuis 2002, aucune demande n’avait été faite, jusqu’à celle déposée en juin dernier par les chercheurs de Newcastle. Ces biologistes, qui mènent des recherches sur l’amélioration des traitements actuels du diabète, espèrent obtenir la différenciation des cellules souches en cellules productrices d’insuline pouvant ensuite être greffées chez des malades.
Si le clonage à but thérapeutique peut conduire, à l’avenir, vers des voies de guérison, il flirte toutefois avec une pratique à risque qui reste aujourd’hui, jusqu’à preuve du contraire, un fantasme : la reproduction d’êtres humains. La technique est semblable, les objectifs opposés.
Le clonage consiste à prélever le noyau d’une cellule somatique adulte (par exemple, une cellule de la peau, de la glande mammaire, du foie) et à l’injecter dans un ovocyte préalablement vidé de son noyau. On réalise ensuite la fusion des deux cellules (la cellule somatique et l’ovocyte) en appliquant un champ électrique pour obtenir la formation d’un embryon qui commencera à se développer. Dans le cas du clonage thérapeutique, on laisse le blastocyte obtenu se développer en éprouvette jusqu’à l’âge de 8 jours environ. On prélève alors la masse cellulaire interne de cet embryon, ce qui le détruit. Les cellules prélevées sont mises en culture afin d’obtenir des cellules souches embryonnaires. Totipotentes, ces cellules souches peuvent se différencier en cellules de nombreux tissus. Dans le cas du clonage reproductif, on réimplante le blastocyte dans l’utérus de la mère porteuse.
En France, la décision d’autoriser le clonage à but thérapeutique a finalement été écartée lors de la révision, en juillet dernier, de la loi bioéthique. Sous la pression des scientifiques, la recherche sur les embryons humains congelés surnuméraires (issus de la procréation médicalement assistée et ne faisant plus l’objet d’un projet parental) a toutefois été autorisée pendant cinq ans à titre ” dérogatoire “. Le ministre de la Santé, Philippe Douste-Blazy, a rappelé, à cette occasion, son ” engagement personnel dans la lutte contre toute forme de clonage à but reproductif ” et a réitéré sa demande ” de voir l’ensemble de la communauté internationale s’inscrire formellement contre le clonage à but reproductif en le distinguant bien du clonage à but thérapeutique dans le cadre de la recherche médicale “.
Stéphanie HASENDAHL