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- Ce sujet contient 14 réponses, 6 participants et a été mis à jour pour la dernière fois par Kayros, le il y a 11 années et 10 mois.
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16 février 2013 à 13 h 22 min #26650
Bonjour,
Je suis actuellement une formation en sciences humaines et sociales sur les maladies chroniques. J’ai choisi de m’intéresser à l’insuffisance rénale chronique et au vécu de cette maladie.
J’aimerais, pour orienter mon travail de recherche, savoir à quel moment on devient réellement malade dans ce contexte, la maladie rénale étant pendant longtemps asymptomatique, silencieuse.
Pourriez-vous à travers votre parcours de vie, me dire l’évènement qui, selon vous, vous a fait entrer dans la maladie rénale chronique? Qui en quelque sorte vous a fait, ou vous fait vous dire “je suis insuffisant rénal au quotidien, c’est mon identité”.
Cela me permettra de cibler certains moments de vie pour mes futurs entretiens.
Je vous remercie d’avance en espérant avoir quelques réponses (en MP ou ici).
Je précise que si certains veulent s’entretenir avec moi en face à face, je suis disponible dans la région bordelaise et montpelliéraine.Cordialement,
Kayros
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16 février 2013 à 14 h 10 min #26651
On devient définitivement et irrémédiablement malade le jour où est découverte par le plus grand des hasards notre insuffisance rénale et/ou sa cause. Dans mon cas, il s’agissait d’une banale échographie.
Le corps médical, avec la délicatesse qui le caractérise, vous balance en quelques secondes que c’est foutu, que vous irez tout droit vers la dialyse et que vous ne pourrez rien faire pour l’empêcher. Vous faites un malaise tellement c’est violent, alors que vous ne vous doutiez de rien. Ces malaises se reproduiront lorsque vous irez vous documenter par vous-même, et constaterez que oui, c’est bien foutu, l’avenir est très noir, et le corps se révolte.
Et puis vous finirez par vous y faire, plus ou moins, et par vous efforcer de survivre, avec les moyens du bord, sans trop écouter les corbeaux qui continuent à croasser sans relâche leurs verdicts de mort.
16 février 2013 à 14 h 51 min #26652Tout d’abord merci pour cette première réponse.
J’aimerais, si possible, quelques petites précisions:
Le diagnostic a t-il suffit à vous faire dire que vous étiez une insuffisante rénale chronique? Ou cela a t-il pris plus de temps? Est-ce qu’après cette échographie vous vous êtes sentie tout de suite différente, malade?
Dans votre témoignage, j’ai l’impression qu’il y a eu le choc de l’annonce mais qu’ensuite s’est produit un travail d’interprétation, d’analyse, de représentation de ce qu’était la maladie rénale chronique. Et que c’est au moment où vous vous êtes confrontée à l’idée d’avenir différent de celui que vous aviez imaginé qu’elle a pris sens dans votre vie?16 février 2013 à 21 h 57 min #26654J’ai su à l’instant même de l’annonce, qui était suffisamment claire, que ma vie venait de se terminer brutalement, et qu’on entrait dans le domaine d’une survie qui ne pourrait plus jamais être aussi libre, joyeuse et insouciante, et où la mort rôderait en permanence. J’ai vu en un éclair toutes les implications, dans tous les domaines, d’où le choc.
Après, je me suis informée sur les détails, et la façon d’organiser cette survie le moins mal possible, en restant une battante. Car un insuffisant rénal qui ne se bat pas est gravement menacé.
Rien n’a jamais pris le moindre sens. On se dit souvent: “qu’est ce que j’ai fait au bon Dieu pour qu’un truc pareil me tombe dessus, alors que de véritables fripouilles ont des reins en parfait état?”. Les bouddhistes sont les seuls à vous répondre, ils vous disent que chacun se choisit, avant d’entrer dans sa nouvelle vie, les fardeaux qu’il est capable de supporter, et l’entourage qui va l’y aider. On aimerait pouvoir en être certain.
18 février 2013 à 4 h 15 min #26659Je pense qu’il y a aussi un certain pourcentage de personne qui ne s’identifient pas comme “malade”.
Par exemple pour moi, la seule vrai période de maladie fut celle de mon hospitalisation pour l’opération de greffe. Je déteste les hopitaux (je ne parle pas du personnel hin ;)). Je parle de l’ennui, d’être bloqué, de l’odeur, de la tristesse de ces lieux…
Après c’est sûr, il y a une petite période de réadaptation en rentrant de l’hopital mais honnêtement dès que les douleurs partent c’est réglé.
18 février 2013 à 17 h 44 min #26666question interessante. Je ne me suis jamais dit tu es malade et c’est ton identité. Le diagnostic IRC fait il y a 30 ans n’a pas été un choc, je me savais malade (HTA avec troubles, malaise) et ça m’a presque rassurée. J’ai eu ensuite 25ans pour me préparer à la dialyse et bien c’est vrai que sans me dire malade j’ai inconsciemment (?) préparée ma vie autour de ça. Mon néphro (coucou BB)a toujours cru que j’occultais ma maladie mais en fait je crois que c’est devenu tellement mon identité (ça fait bizarre presque comme s’il s’agissait d’un choix! je suis peut être bouddhiste sans le savoir!)que je ne me pose jamais La question “et si je n’avais pas été IRC”?.
En fait aprés réflexion en réponse à votre question je n’ai pas eu de grand soir en me disant bon tu es insuffisante rénale. Nastia dit qu’il faut être un battant, c’est vrai mais ma méthode doit être l’évitement.18 février 2013 à 18 h 31 min #26668Mais est-ce de l’évitement ? Je me pose la question.
18 février 2013 à 18 h 55 min #26669Bonjour. Je savais depuis l’age de 20 ans environ ( j’en ai 67) que j’avais des petits problèmes rénaux mais sans que cela me trouble vraiment. J’ai toujours été très sportif et je me suis toujours senti JEUNE jusqu’au jours, à 60 ans, où lors de ma première visite, mon néphrologue m’a abruptement déclaré : « dans 2 ans vous serez sous dialyse ». J’ai subi un vrai choc, je crois avoir pleuré en comprenant tout d’un coup que maintenant, j’étais VIEUX. J’ai réagi en ne changeant surtout rien à mes habitudes et en me persuadant que je n’étais pas un malade puisque je ne ressentais pas une dégradation de mes capacités physiques.
Pour ma retraite, j’ai changé de région et mon nouveau néphrologue a réussi à me maintenir sans dialyse pendant 6 ans. Maintenant je suis sous dialyse péritonéale, que je considère simplement comme une suppléance à des reins déficients et donc, pour moi et mon entourage, je ne suis pas à proprement parler un malade. Contrairement à Nastia, je n’ai pas eu vraiment à me battre, sans doute parce que mon IRC n’a jamais eu d’impact fort sur mon état de santé et que je suis délibérément optimiste.18 février 2013 à 19 h 59 min #26671Alors d’abord merci à tous!
Je ne pensais pas avoir autant de réponses aussi rapidement 🙂
Je trouve vos expériences très intéressantes.Pour Nastia, votre maladie a envahi sa vie au moment de l’annonce du diagnostic, qui a été un violent choc ayant engendré une rupture biographique. Avez-vous eu l’impression de ne plus être un membre de la société comme un autre ?
Pour vurtuel au contraire, même en ayant été jusqu’à la transplantation, vous ne vous êtes jamais vu comme un malade. Qu’a représenté la transplantation dans votre parcours? Est-ce parce que la maladie n’a jamais impacté votre vie de relation/professionnelle que vous ne vous sentiez pas malade? Qu’est-ce qu’être malade pour vous?
Pour Gustavie, c’est à partir du moment où vous avez dû vous préparer à la dialyse que votre maladie a pris sens dans votre vie? Dès l’annonce de l’évolution? Ou après en avoir discuté autour et vous être renseignée? Vous avez “préparé votre vie autour de ça”, la maladie rentrait en compte dans vos différents choix de vie?
Pour Merienne, a quel âge vous avait-on diagnostiqué IRC? Est-ce que vous ne vous êtes jamais senti malade, également parce que votre place dans la société (travail/famille+++) ne vous a pas semblé changée? Auriez-vous pensé la même chose si vous étiez sous hémodialyse à l’hôpital?Encore merci à tous, en espérant obtenir d’autres récits.
18 février 2013 à 22 h 06 min #26673Bien qu’aillant eu des crises de goutte 20 ans auparavant, mon médecin ne m’a révélé mon IRC qu’à l’age de 58 ans. J’ai eu la chance de ne pas avoir été sous dialyse pendant mon activité professionnelle (j’étais ingénieur), mais je pense malgré tout que la DPA ne m’aurais pas pénalisé outre mesure. Vous avez raison, l’hémodialyse à l’hôpital m’aurait sans doute fortement déstabilisé avec la conscience d’être réellement un malade. J’avoue avoir un brin d’admiration pour tous ceux et celles qui sont confrontés aux contraintes de la HD.
20 février 2013 à 2 h 31 min #26685Alors d’abord merci à tous!
Je ne pensais pas avoir autant de réponses aussi rapidement 🙂
Je trouve vos expériences très intéressantes.Pour vurtuel au contraire, même en ayant été jusqu’à la transplantation, vous ne vous êtes jamais vu comme un malade. Qu’a représenté la transplantation dans votre parcours? Est-ce parce que la maladie n’a jamais impacté votre vie de relation/professionnelle que vous ne vous sentiez pas malade? Qu’est-ce qu’être malade pour vous?
Non, si vraiment je devais me sentir malade, je dirais que j’en ai plus(+) l’impression depuis la greffe parce que je reste quelqu’un de terre à terre. Et maintenant au lieu d’avoir une dégradation suivie et lente de la fonction rénale (sans surprise), il peut arriver n’importe quoi, n’importe quand. On entre dans le domaine de la bidouille.
Je n’ai pas été impacté non. On réfléchit (je pense), un peu plus que les autres sur des choix de vie. Par exemple, en travaillant à l’étranger: est-ce que je prend telle ou telle assurance, est-ce que ce n’est pas risqué de pouvoir être viré du jour au lendemain sans protection ? …
Ou en voyage aussi comment m’assurer ? …
Mais ce n’est pas se sentir malade c’est juste prévoir (ce que tout le monde même bien portant devrait faire)A mon avis (c’est mon avis), se sentir malade et le laisser transparaitre ne peut que entrainer des discriminations (pros ou relationnelles).
C’est pour cela après qu’on a l’impression de devoir être un battant.
Je vis ma vie très bien (on verra le jour ou ça n’ira pas mais pourquoi y penser ?) et donc je n’ai aucune raison de me sentir malade, je démissionne, je pars en voyage plusieurs mois lors dans ma première année de greffe… La vie quoi.Être malade c’est ne plus pouvoir vivre comme tout le monde. Or prendre x pillules par jour, je n’appelle pas ça une contrainte honnêtement. C’est embêtant d’accord mais c’est rien du tout.
20 février 2013 à 13 h 09 min #26687Mais si, je suis un membre de la société comme un autre, car il y a des millions d’éclopés comme moi en France, et beaucoup de winners triomphants ne perdent rien pour attendre, même s’ils n’en sont pas conscients.
Je n’ai plus toutes les cartes en main, je dépends d’une machine et de prescriptions qui ne sont pas toujours conformes à ce que je souhaiterais. Mais nous sommes des dizaines de millions dans cette situation de dépendance, pour une raison ou une autre, sociale, physique, mentale, familiale.
Tant que l’euthanasie de tous les éclopés n’a pas été votée,je suis membre à part entière de cette société, bien sûr. Et la qualité d’une société se juge à la façon qu’elle a de traiter ses membres les plus vulnérables.
21 février 2013 à 4 h 00 min #26695Kairos,
Il me semble que vous avez quand même un problème sérieux de méthodologie; vous commencez vos interviews en posant dès le début des postulats qui orientent beaucoup trop les réponses. C’est malheureusement courant dans les sciences molles, mais il faudrait arriver à être beaucoup plus rigoureux que ça.
En posant explicitement la question ” quelque sorte vous a fait, ou vous fait vous dire “je suis insuffisant rénal au quotidien, c’est mon identité”.” vous amenez forcément votre interlocuteur à une notion identitaire, qui est sans doute ce que vous aimeriez avoir comme résultat, et qui sera sans doute le résultat que vous obtiendrez au final vu que vous contextualisez la question sur cet aspect-là, mais qui ne correspond pas nécessairement à la perception qu’ont un certain nombre de malades.
A titre personnel, être malade chronique n’est absolument pas mon identité, je suis beaucoup de choses, professionnellement, personnellement, socialement, mais la maladie, je ne fais que la subir, je n’ai pas attendu qu’elle arrive pour avoir une identité, et je serais assez affligé que mon entourage puisse me percevoir identitairement comme malade (sauf bien sûr dans le cadre hospitalier où là effectivement, je suis un patient IRC terminal).
Pour le reste, faites des questions plus ouvertes, vous aurez peut-être moins les résultats que vous attendez, mais votre travail sera plus intéressant que si vous ressortez exactement les mêmes perspectives “standards” de la perception sociale de la maladie que vos “collègues”.
21 février 2013 à 13 h 12 min #26696Bonjour ThreeSigma,
Votre remarque est très juste, très pertinente.
Je parcoure les forums pour savoir quels sont les moments clés dans la vie d’un insuffisant rénal chronique, et à quels moments la maladie prend une part importante dans la vie.
Cela me permet de savoir où je vais pour mieux définir ma population d’étude.
Mais, rassurez-vous, mes entretiens se feront sous forme de récits de vie/entretiens compréhensifs sans orienter le propos dans le sens recherché. Je ne me servirai pas des réponses des forums dans mon travail.En tout cas merci pour cette critique!
Je remercie également tous les autres participants pour leurs réponses. 🙂
22 février 2013 à 23 h 16 min #26709J’ai eu à travers les différents forums sur l’insuffisance rénale de quoi me faire une idée plus précise afin d’entamer mon travail de recherche.
Je vous remercie tous et aimerais fermer ce fil de discussion (si quelqu’un sait comment faire…), à moins que ce soit l’occasion d’échanger votre ressenti.Merci encore.
Kayros.
c’est fait
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