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Ségolène Aymé, généticienne et épidémiologiste, directrice de recherche à l’Inserm
“Beaucoup des tests génétiques proposés sont de l’arnaque”
LE MONDE | 04.11.08 | 15h59 • Mis à jour le 04.11.08 | 18h02uérir avant même d’être malade ? Sous le mot-valise de “médecine prédictive”, la Cité des sciences et de l’industrie à Paris se penche, jusqu’au 8 février 2009, sur l’univers des tests génétiques, de l’imagerie médicale et du dépistage. Autant de techniques dont le développement a explosé ces dernières années. Au moment où la France s’engage dans la révision de la loi de bioéthique, cette exposition présente les avancées et les mirages de cette médecine dite prédictive. Que peut-on réellement en attendre ? Ségolène Aymé, généticienne et épidémiologiste, directrice de recherche à l’Inserm et responsable d’Orphanet (portail des maladies rares), fait le point.
Pourra-t-on bientôt prévoir les grandes maladies grâce à la génétique ?
Il ne faut pas mettre la génétique à toutes les sauces. La médecine génétique a fait d’énormes progrès ces vingt dernières années pour les maladies génétiques – c’est-à-dire celles entièrement déterminées par un seul gène – qui touchent environ 1 % à 2 % de la population générale. Elle permet d’expliquer à ces personnes pourquoi elles sont malades et aussi de savoir si, dans une famille, d’autres personnes seront à risque. Avec le diagnostic préimplantatoire (DPI), par exemple, on rend d’immenses services à certains couples très éprouvés par des maladies rares. Mais le DPI reste archi-marginal. Trois centres en France en réalisent environ cinquante par an. Il faut rapporter cela aux 800 000 naissances chaque année… Pour ce qui est des maladies communes, la génétique ne joue qu’un petit rôle à côté d’une multitude d’autres facteurs.
Pourtant, aux Etats-Unis, le marché des tests génétiques se développe sur Internet ?
Beaucoup des tests génétiques actuellement proposés sont de l’arnaque. Leur utilité médicale est nulle. Les gènes ne sont pas des éléments isolés, mais travaillent de concert et sont en interaction avec leur environnement. Ce qui est constaté dans une population, dans un lieu géographique n’est généralement pas transposable ailleurs. De plus, les gènes sont plastiques, ils s’expriment ou non. Calculer un risque individuel en testant tous les gènes connus, personne ne sait le faire. Pour le cancer du sein, par exemple – en dehors des 5 % à 10 % de cas qui sont entièrement déterminés par la génétique -, les gènes jouent un faible rôle. Les tests génétiques proposés aux Etats-Unis ont été développés par des entreprises privées qui ont désormais besoin de rentabiliser leurs investissements. Leur développement relève d’un pilotage de la demande par l’offre. Les problèmes posés par cette génétique récréative relèvent plus de la protection du consommateur que de l’éthique.
Quelle peut être l’évolution de la médecine prédictive ?
L’imagerie va davantage se développer. Aux Etats-Unis, les gens bien informés passent une IRM (imagerie par résonance magnétique) tous les ans pour détecter d’éventuelles petites tumeurs ou un anévrisme. Mais cela est aussi “vaseux” que les tests génétiques. Ce n’est pas parce qu’une tumeur est là qu’elle va se réveiller. Vingt à trente ans peuvent s’écouler avant qu’elle se développe. A trop savoir, le risque est d’être confronté à des situations difficiles à gérer. Tout cela rejoint le problème posé, par exemple, par le dépistage du cancer de la prostate. Les politiques de dépistage précoce peuvent faire apparaître des maladies qui se seraient très tardivement ou jamais exprimées.
A un moment donné, il faut se poser la question de l’évaluation de la balance bénéfice-risque. J’ai plaidé depuis plusieurs années pour la création d’un comité national d’évaluation des dépistages, comme il en existe aux Pays-Bas ou en Grande-Bretagne. Les responsables politiques adorent les politiques de dépistage ; en réalité, en population générale, le bénéfice est très faible, sans parler de leur coût financier. Pour le cancer du sein, on est en train de s’apercevoir que les femmes continuent de mourir de leur cancer au même âge, à traitement égal. Elles sont dépistées plus tôt, mais on ne gagne pas d’années de vie. Néanmoins, le dépistage a des avantages indirects sur l’organisation des filières de soins.
Quelle est, alors, la meilleure médecine prédictive ?
Les grands déterminants de la santé sont l’alimentation et le mode de vie. Nous sommes programmés pour avoir une alimentation régulière et de proximité. Aujourd’hui, nous sommes déstabilisés par la surabondance et la mondialisation de la nourriture. Il faut réapprendre à avoir un rapport sensé avec son environnement.
Propos recueillis par Sandrine Blanchard
Que faire en cas d’épidémie ? A vous de “jouer”Eté 2015 à Nice. Les vacanciers commencent à affluer. Lors d’un conseil municipal, la nouvelle tombe : une dizaine de cas de chikungunya ont été identifiés. Que faire ? C’est à ce type de scénario que les visiteurs de l’exposition “Epidémik”, proposée jusqu’au 16 août 2009 par la Cité des sciences, à Paris, sont confrontés. Dans une salle de 500 m2 transformée en boîte noire, qui, au gré des décisions, se couvre d’images, chaque participant est invité à endosser le rôle de “décideurs” ou de citoyens. Ce jeu de simulation de crise entend démontrer que “tout le monde peut peser sur la marche d’une épidémie”, expliquent ses concepteurs. Auparavant, les visiteurs de “l’expo contagieuse” découvrent toute l’histoire des grandes épidémies ; de la peste noire, qui fit 25 millions de morts en Europe au XIVe siècle, à la grippe espagnole de 1918, jusqu’aux menaces plus récentes de grippe “aviaire”.
Article paru dans l’édition du 05.11.08
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