KidneyX : comment les Etats-Unis souhaitent révolutionner le traitement de l’insuffisance rénale par l’innovation
Dans quelques semaines débutera officiellement aux USA un grand concours, sur le modèle des XPrizes, ouvert à des équipes techniques et scientifiques, dont l’objectif est de transformer totalement les traitements des maladies rénales et de l’insuffisance rénale.
A la clé, des montants importants – au moins 25 millions de dollars – une notoriété susceptible d’attirer des investisseurs, mais surtout le soutien du gouvernement américain pour accélérer la commercialisation et permettre aux patients d'accéder rapidement à ces innovations.
Voici plusieurs années que la société savante américaine de néphrologie – American Society of Nephrology (ASN) – se mobilise autour de ce projet.
Son Président, le Dr Mark D. Okusa, dénonce ainsi l’absence durable d’innovation en néphrologie et ses conséquences pour les malades : "A l’heure actuelle, un seul médicament est efficaces contre la maladie rénale chronique : les bloqueurs du systéme rénine – angiotensine (une classe d’anti-hypertenseurs). Il permet au mieux de retarder la dialyse de 6 mois à 1 an.(…) Depuis l’invention de la dialyse en 1943 par Willem Kolff, les patients ne sont plus condamnés à une mort certaine. (…) Mais à part quelques améliorations mineures, la dialyse n’a fait aucun progrès depuis 50 ans. (…) Elle reste un traitement imparfait, dont la mortalité est supérieure à celle du cancer : aux USA, la moitié des patients qui commencent la dialyse sont décédés au bout de 3 ans. (…) Les trois séances hebdomadaires sont épuisantes moralement et physiquement délabrantes".
Selon l’ASN, plusieurs raisons expliquent cette absence d’innovation : le manque de moyens consacrés à la recherche en néphrologie – moins de 1% du coût de la dialyse pour le système de santé, les conditions de financement de la dialyse, qui découragent tout engagement industriel en direction de l’innovation, l’absence de concurrence entre les grands groupes de dialyse, ainsi que le fait que les patients dialysés sont trop malades pour défendre leurs propres intérêts et réclamer un meilleur traitement.
Le projet "KidneyX" devient réalité en 2018, grâce à l’engagement du Department of Health and Human Services, c’est-à-dire du gouvernement américain. Son directeur, Bruce D. Greenstein, déclarait en avril dernier : "la dialyse n’a connu aucune amélioration substantielle depuis cinquante ans, alors qu’en cancérologie ou en cardiologie, par exemple, des progrès considérables ont été réalisés. Ma mère est morte en 2017, après 14 ans de dialyse. Son traitement a été exactement identique entre le premier et le dernier jour. Le tout pour un coût pour le système de santé considérable, supérieur chaque année au budget de la NASA".
KidneyX est un fond pour l’innovation reposant sur un partenariat public – privé (Gouvernement américain / ASN) visant à accélérer le développement et la commercialisation de technologies de rupture en néphrologie, pour réduire le nombre de patients nécessitant le recours à la dialyse et à améliorer la vie des 850 millions de personnes atteintes de maladies rénales dans le monde.
Ses objectifs spécifiques sont d’apporter des progrès dans les domaines suivants :
– le diagnostic des maladies rénales
– les dispositifs de biologie : techniques de mesure à domicile d’indicateurs comme la fonction rénale en temps réel
– la dialyse de demain : rein artificiel implantable, rein bio-artificiel, etc.
– l’ingénierie tissulaire, par exemple pour les accès vasculaires
– les thérapeutiques : médicaments pour ralentir, bloquer la progression, voire guérir les maladies rénales
– les outils centrés sur les patients : dossiers digitaux, applications de renforcement des capacités pour gérer sa maladie rénale, par exemple dans le domaine de la nutrition, etc.
La toute première étape de KidneyX, intitulée « Re-designer la dialyse » sera lancée fin octobre 2018, avec un budget total de 2,6 millions de dollars. Elle se déroulera en deux phases. La première se terminera en février 2019 et permettra l’attribution de 15 prix de 75.000$ chacun, à des projets permettant de reproduire de façon plus efficace que la dialyse les différentes fonctions d’un rein normal. La seconde phase, qui se déroulera entre avril 2019 et janvier 2020, récompensera de trois prix de 500.000$ chacun la réalisation des prototypes correspondant.
Les promoteurs de KidneyX affirment que leur initiative permettra des avancées majeures en néphrologie dans les 10 ans qui viennent. On peut regretter que la France ne soit pas plus impliquées dans ce type de projet, mais aussi espérer que les avancées réalisées bénéficieront à tous les patients, au-delà des frontières.
2 Commentaires
Bonjour,
Je dialyse de nuit (8 heures/séance) depuis quelques années et je puis vous assurer que je bénéficie d’un confort de vie incomparable à la dialyse “traditionnelle” de jour. Je travaille à temps plein et je me rends à mon travail après ma nuit de dialyse. Je reconnais que mon travail ne me sollicite pas physiquement : je suis un cadre ‘B’ dans la fonction publique. J’ai vécu une expérience douloureuse de greffe ratée que j’ai couché dans un livre (https://www.edilivre.com/chambre-217-maxime-de-kerguelen.html/)
Mon propos est celui-ci : qu’en est-il du rein en 3D ? Les américains ont plusieurs années d’avance sur nous: https://youtu.be/tUxHk_pzH5M
😆 encore un breton qui vante les mérites de la dialyse Longue nocturne. La dialyse longue nocturne permettrait de révolutionner ce sujet et d’avoir des patients en bien meilleur forme et qui continue de travailler… C’est tellement une évidence sur ce sujet (( difficile de comprendre qu’elle soit très rare (moins de 0.6% des dialysés pratiquent cette dialyse)
Bernard j’ai lu votre livre, J’ai un peu connu le même parcours de soin que le vôtre : échec cuisant de greffe (( Je vais sortir un documentaire pour essayer de militer et promouvoir la dialyse longue nocturne (je suis de Rennes). tu peux aller voir ma page facebook : “La montagne dans le sang ” pour plus d’infos. bon courage @ bientôt