La dialyse à l’heure de la télémédecine
30 septembre 2003, Le Quotidien du Médecin
5e Réunion commune de la Société de néphrologie et de la Société francophone de dialyse. Nancy, 30 sept.-3 oct. 2003.
La télémédecine a pour objet l’intervention médicale à distance. Depuis quelques années, la télédialyse a fait son apparition, en particulier au Canada et en France. Les méthodes employées sont variées, et les résultats, encourageants, permettent d’envisager une diminution de la morbidité liée à la dialyse.
A Nancy, le programme Diatélic est un système intelligent qui permet la télésurveillance des patients en dialyse péritonéale à domicile. L’enregistrement des données du patient et des échanges de messages avec les médecins est quotidien. Chaque patient enregistre ses données grâce à une application conviviale. Les généralistes disposent d’un service de messagerie leur permettant de communiquer avec les spécialistes et les patients, et ils ont accès aux données de leurs malades. Le centre de soins peut visualiser l’ensemble des données du patient pour participer au soin ou réagir aux alertes générées par le système expert, notamment sur son état d’hydratation. Les données recueillies sont traitées selon un modèle dit markovien : le système calcule la probabilité pour un malade de se trouver dans un état prédéfini, hyperhydraté, déshydraté ou normal, en adaptant ses règles de calcul en fonction des valeurs des jours précédents, et des éventuelles corrections apportées par le néphrologue référent à ses diagnostics antérieurs. Le système est autoapprenant.
Dans une étude prospective contrôlée randomisée, il a été montré que le système Diatélic a permis de réduire de façon importante la morbidité grâce à ce meilleur contrôle de l’hydratation.
L’expérience acquise à Nancy peut être rapprochée de celle de P. Simon et coll. Le centre hospitalier de Saint-Brieuc dispose du centre de dialyse le plus important de Bretagne et assure la responsabilité d’un centre situé à Lannion, sans néphrologue en juillet et en août.
Le système mis en place, baptisé Mégalis, comporte une téléassistance permanente et une assistance par visiophone. La téléassistance permet la surveillance d’une séance de dialyse à partir d’un poste central, grâce à un logiciel (Dialmaster, Gambro-Hospal). L’assistance par visiophone permet de communiquer avec l’infirmière et le patient, et elle est matérialisée par la constitution d’un acte médical de dialyse (AMD). Le résumé des paramètres fournis par le logiciel est intégré dans l’AMD, puis dans le dossier de surveillance au long cours.
Mégalis en est à sa troisième année d’existence. Les résultats satisfaisants des deux premières années ont conduit l’agence régionale de l’hospitalisation à étendre l’autorisation d’ouverture du centre de Lannion aux vacances de Toussaint, Noël, février et Pâques en 2003-2004. Un centre de dialyse permanent de huit postes, entièrement télésurveillé, ouvrira en 2005, en partenariat avec l’Association pour l’aide aux urémiques de Bretagne.
A Strasbourg, J. Cinqualbre et son équipe étudient depuis deux ans un programme dont le premier principe est de centrer l’action de soins sur le patient lui-même et de l’encadrer par le centre de greffes et par un médecin exerçant à proximité de son domicile. Ce médecin, partenaire à part entière, doit bénéficier d’un accès complet et permanent au dossier hospitalier, dès lors qu’il a suivi une courte formation spécifique. Le second principe est de s’appuyer sur le patient comme partenaire actif.
Strasbourg, Canada : des expériences encourageantes
Le dispositif est développé à partir d’un logiciel de transmission, de présentation et d’analyse de données (AlisLap) et d’un logiciel de visioconférence. Il fonctionne même si le patient ne dispose que d’une ligne téléphonique standard. Le médecin doit, en revanche, disposer d’un haut débit. L’interface patient est très simple, ce qui facilite la transmission d’informations. Son observance peut être vérifiée et une action pédagogique est possible.
Au Canada, TELENEPHRO a vu le jour en 1998. Ce programme a été développé par la corporation hospitalière Beauséjour (Nouveau-Brunswick). Celle-ci est composée de trois établissements de santé dont l’hôpital régional Dr Georges-L.-Dumont, qui est l’un des deux centres de la province qui comporte un service de néphrologie. TELZENEPHRO permet le transfert d’images radiologiques, la gestion des données de dialyse, la vidéoconférence et la gestion des informations cliniques. Il s’adresse aux patients habitant à une distance comprise entre cent et deux cent cinquante kilomètres du service de néphrologie de la corporation. Un lien direct est établi entre les patients à domicile ou dans un centre de dialyse auxiliaire, et les infirmières, les néphrologues et les autres membres de l’équipe multidisciplinaire de la corporation. Ce projet favorise donc la téléconsultation, le télédiagnostic, la téléradiologie et le téléapprentissage pour les patients et les professionnels de santé qui n’ont pas accès à cette expertise dans leur région.
Ce système améliore la qualité de vie des patients et facilite l’accès des patients et des professionnels de santé à des services spécialisés. Les patients disposent d’un soutien pédagogique. TELENEPHRO contribue ainsi à diminuer la morbidité.
Dr Gérard BOZET
D’après un entretien avec le Dr Jacques Chanliau (CHU, Nancy).