Témoignage : “Je vis dans une double prison : celle du confinement, et celle de ma machine de dialyse”
✅ Voici quelques jours Renaloo lançait son observatoire des pertes de chances liées au Covid19, destiné à recueillir vos témoignages sur les dysfonctionnements de vos soins en raison de l’épidémie.
Vous êtes déjà nombreux à avoir participé, en nous signalant des situations souvent très difficiles. Nous avons décidé de publier certains de vos témoignages.
➡️ Voici celui d’Emilie.
J’ai 38 ans et je suis en dialyse depuis 5 ans maintenant. J’attends une greffe d’un donneur extérieur, car je suis hyper-immunisée, ayant déjà été greffée deux fois + deux grossesses.
J’ai eu rendez-vous dans mon centre de greffe en janvier, pour les examens annuels (anesthésie, chirurgien…). Ce centre est déjà un qui propose une des attentes les plus longues de France en moyenne. Depuis le covid, l’infirmière coordinatrice m’a dit que de toute façon, ça faisait un an qu’ils ne greffaient quasiment plus, faute de place, de personnels et de temps.
Même si je m’y attendais, cette nouvelle m’a beaucoup déprimée. Mon néphrologue a en plus cruellement manqué de compassion en ajoutant “Bah, du moment que la dialyse fonctionne, ce n’est pas si grave !”.
Si c’est grave.
Chaque soir, en me branchant à ma machine, je songe à tous ces organes perdus, dans lesquels il y avait peut-être celui qui me libererait de ma dépendance à une machine, qui m’empêche de dormir comme il faut, qui exige que je sois chez moi, qui demande une organisation impossible pour partir en vacances, qui amenuise chaque soir un peu plus ma santé, physique comme mentale.
La dialyse est une prison. En tant qu’insuffisante rénale, je suis également très à risque, heureusement vaccinée.
Je vis donc dans une double prison : celle du confinement, et celle de ma machine.
Et le peu de mesures prises par le gouvernement, qui essaye de ménager la chèvre et le chou par des mesurettes ridicules et inutiles, m’exaspère.
J’ai envie de pleurer chaque fois que je pense à ce délai qui s’allonge, à tous ces gens qui attendent et n’ont plus aucune chance d’être appelé.
Nous sommes condamnés à perpétuité, sans espoir actuel de sursit.
Emilie Levraut
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> Voir aussi notre dernier bilan des conséquences de l’épidémie sur la greffe rénale.