Des biologistes ont créé des neurones humains à partir de cellules souches embryonnaires
16 août 2004, Le Monde
Un espoir dans le traitement du Parkinson.
Une équipe de biologistes, dirigée par le docteur Lorenz Studer (Laboratoire des cellules souches et de biologie tumorale, Memorial Sloan-Kettering Cancer Center, New York), vient, pour la première fois, d’apporter la démonstration que des cellules souches prélevées sur des embryons humains pourraient être utilisées avec succès dans le traitement de la maladie neurodégénérative, aujourd’hui incurable, de Parkinson. Les travaux de cette équipe ont été publiés le samedi 14 août sur le site des Comptes-rendus de l’Académie américaine des sciences.
Les cellules souches embryonnaires se caractérisent par une double propriété : elles peuvent se reproduire indéfiniment à l’identique et, d’autre part, se différencier de manière à donner naissance à l’ensemble des cellules qui composent les différents tissus, solides et liquides, de l’organisme. L’un des domaines les plus porteurs d’espoir concerne l’obtention, à partir de ces cellules souches, de cellules nerveuses et ce, dans le but de pratiquer des greffes intracérébrales afin de lutter contre les diverses affections neurodégénératives.
“PREMIÈRE ÉTAPE”
Différents travaux expérimentaux menés ces dernières années, notamment sur la souris, avaient permis de préciser de quelle manière l’on pouvait obtenir, à partir des cellules souches embryonnaires, différents types de cellules qui constituent le système nerveux central, comme les neurones et les astrocytes. Pour autant, aucune équipe de biologistes n’était encore parvenue à obtenir une différenciation plus fine afin de pouvoir disposer de certains sous-types de neurones présents dans des régions spécifiques du cerveau humain.
C’est cette barrière qui vient d’être franchie avec la publication de l’équipe du docteur Studer, dont le premier signataire est Anselme Perrier, biologiste français, ancien étudiant de l’Ecole normale supérieure, qui, après une thèse de neurosciences, a rejoint l’équipe américaine. Ces chercheurs sont notamment parvenus à transformer une très grande proportion (plus de 70 %) de cellules souches embryonnaires humaines en neurones dits “dopaminergiques”, cellules nerveuses directement impliquées dans la physiopathologie de la maladie de Parkinson. “Nos résultats ont été confirmés à partir de trois lignées différentes de cellules souches humaines et deux de singes, expliquent les auteurs de cette publication. La possibilité de disposer d’une quantité illimitée de neurones dopaminergiques est la première étape de l’exploration des potentialités des cellules souches dans le traitement de la maladie de Parkinson.” Ce système expérimental fournit, d’autre part, un puissant outil pour étudier les mécanismes moléculaires qui contrôlent le développement et le fonctionnement des neurones dopaminergiques dans le cerveau humain.
Pour le professeur Marc Peschanski (Inserm), spécialiste renommé des recherches sur le traitement de la maladie de Parkinson, cette publication est un premier pas dans la concrétisation de l’espoir que beaucoup de scientifiques ont quant à la possibilité d’utiliser les lignées de cellules souches embryonnaires humaines pour des greffes intracérébrales.
Jean-Yves Nau