Loi de bioéthique : les propositions de la mission d’information
La mission d'information sur la révision des lois de bioéthique, mise en place l’été dernier, à rendu son rapport mi-janvier 2019. Il comporte plusieurs propositions sur le don et la greffe d’organes, qui sont très proches de celles de Renaloo.
La greffe à partir de donneur vivant
La mission propose de :
- Rendre possible le don altruiste, dans le cadre de l’anonymat, ainsi que les chaînes de dons croisés, en supprimant l’obligation de simultanéité de la réalisation de ces greffes.
- Imposer le suivi annuel de l’état de santé des donneurs vivants, aujourd’hui réalisé de manière très inégale.
- Renforcer la neutralité financière du donneur, en lui accordant un véritable statut : des améliorations sont préconisées pour les remboursements des frais relatifs au don, en termes de délais et afin de garantir que les donneurs ne subissent aucune perte financière. Un système qui se rapprocherait de la prise en charge des affections de longue durée (ALD) est proposé afin d’éviter l’avance de certains frais, notamment lorsque "l’intervention et le suivi induisent des coûts de transport importants" (patients ultramarins par exemple).
- Prévoir, dans l’éventualité exceptionnelle où un donneur de rein devient lui-même insuffisant rénal des années plus tard, qu'il puisse "bénéficier d’une certaine priorité pour recevoir à son tour un greffon rénal".
Le prélèvement sur donneurs décédés
Le rapport reprend largement les propositions formulées dans le cadre de la mission flash du député Jean-Louis Touraine en décembre 2017.
Il propose de :
- Renforcer la sensibilisation du public, notamment en intégrant I’information sur le don d’organes et la greffe au futur service national universel et dans le programme de sciences et vie de la Terre (SVT) au collège.
- Charger l’Agence de la biomédecine de coordonner une étude sur les causes de l’opposition au don d’organes. Cette étude pourrait par exemple s’intéresser à chaque région où le taux d’opposition au prélèvement est supérieur à la moyenne afin d’en approfondir l’analyse et de rechercher des solutions adaptées.
- Améliorer la formation des équipes soignantes, notamment en créant un diplôme de coordination en vue d'une transplantation, et en introduisant un module obligatoire sur le prélèvement et la transplantation au cours des études de médecine et de soins infirmiers.
Le rapport indique que l'organisation des prélèvements et des transplantations à l’hôpital doit être consolidée. Il préconise notamment de :
- Renforcer l’accès aux blocs opératoires pour les activités de prélèvement et la greffe.
- Mettre en place des équipes volantes de coordination, en appui des équipes locales.
- Garantir que des astreintes en nombre suffisant sont organisées, au moins dans tous les CHU.
- Développer les prélèvements sur donneurs décédés après arrêt circulatoire dits Maastricht III. Dans ce contexte particulier, il est proposé d’autoriser, sous conditions, la consultation du registre national des refus avant la déclaration du décès.
Il recommande d’améliorer l’évaluation de ces activités, qui doit être permanente, en temps réel, conçue avec les acteurs de terrain, pour identifier des corrections à apporter.
Il propose enfin de donner à l’Agence de la biomédecine la possibilité de conseiller, d’accompagner et d’inciter à des améliorations de pratiques dans les hôpitaux à activité insuffisante, à effectif inadapté, à organisation défaillante, ou à taux de refus excédant la moyenne. De fait, l'Agence ne dispose aujourd'hui d'aucun moyen d'action lorsque des dysfonctionnements sont constatés.
La position des parlementaires semble donc plus ouverte et volontariste que celles du CCNE ou du Conseil d’Etat, en retrait sur beaucoup de ces points. Dans le contexte d'une diminution des prélèvements et des greffes constatée en 2018, cette dynamique est essentielle.
On peut cependant regretter l'impasse ait été faite par la mission sur plusieurs sujets éminemment éthiques, comme la décision partagée ou encore l'équité de la répartition des greffons rénaux. On rappelle que le CCNE recommande que les inégalités d'accès à la greffe soient résorbées.
Le projet de loi de bioéthique devrait être déposé par le gouvernement auprès du Conseil d’Etat en juin. Les débats se tiendront donc au parlement à l’automne 2019.