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Vincent : mon histoire

Mon histoire est bien proche de celle d’Yvanie et de nombre de celles et ceux qui ont eu la gentillesse de prendre le temps de témoigner sur son site. J’ai puisé dans ces témoignages beaucoup d’information fort utile, pour comprendre ce qui m’arrivait ou plutôt essayer d’appréhender ce qui allait m’arriver à chacune des grandes étapes que l’on rencontre au cours de ce type de cursus. Je tiens donc en premier lieu à remercier chaleureusement tous les contributeurs à ce site.

J’ai 29 ans. Ma maladie rénale a été diagnostiquée formellement par le biais d’une biopsie alors que j’avais 20 ans, à Necker. Les signes annonciateurs avaient été une hypertension marquée (18/12) ainsi que du sang et de l’albumine dans mes urines, autant d’annonciateurs fiables d’un problème rénal. J’étais donc atteint d’une maladie de Berger, rien à voir avec la sympathique notion d’alpages ou de moutons, non, une maladie semble-t-il génétique, qui entraîne souvent une détérioration voire une disparition de la fonction rénale. S’ensuivirent 9 années sous traitement pour contenir la progression de la maladie, avec diurétiques et quelques hypotenseurs. Je n’ai, durant cette phase, pas eu de réel problème (excepté des crises de goutte générées par des excès d’acide uriques dus aux diurétiques, très très désagréable) et ai profité pleinement de ces années sans jamais imaginer ni prendre conscience de ce que la maladie m’attendait au tournant. Heureusement d’ailleurs, car je suis convaincu que mon ignorance m’a permis cette vie ” normale ” que j’ai tant appréciée.

C’est en 2003 que tout a dérapé, on peut dire que j’ai été, moi aussi, une victime de la canicule. Au mois de Mai, je faisais ma visite de routine à l’Hôpital et rien ne permettait d’entrevoir de dégradation de ma situation. J’ai passé l’été en en profitant au maximum, et comme tout le monde, je buvais beaucoup, d’eau bien sûr !!! Certains signes auraient cependant pu m’alerter : bien que mangeant raisonnablement, je prenais régulièrement du poids (qui s’avérera être de l’eau), mes pieds avaient du mal à rentrer dans mes chaussures lorsque je suis revenu au boulot en Août (un peu d’œdème bien sûr…). Mais, ce n’est qu’en septembre, alors que j’étais pris de sévères maux de tête et que quelques prises de tension laissaient poindre des chiffres en forte augmentation (18/12), que mon médecin et moi décidions d’avancer les examens prévus pour ma prochaine visite de routine. La sanction ne se fit pas attendre, créatinine en forte hausse (vers 49/50 mg/l), urée aussi, enfin bilan vraiment pas terrible…On m’a fait une biopsie fin septembre, la fonction rénale était bien détériorée, et la créatinine montait de jour en jour pour atteindre début Octobre environ 800 mmol/l. On a tenté un traitement ” lourd ” à la cortisone avec l’espoir de m’éviter la dialyse pour passer directement à la greffe que l’on imaginait déjà soit avec ma mère soit avec ma sœur. Par prudence, le médecin a décidé de me faire faire une fistule, pour le cas où… Je me revois dans la salle d’attente du chirurgien qui allait s’occuper de cette intervention. Il y faisait très chaud et les 6-7 personnes (pas mal de mamies) qui s’y trouvaient échangeaient sur les ” n ” fistules qu’on leur avait fait sans succès, sur la pénibilité de l’intervention, la douleur… le café du commerce mais pas dans sa version sympathique…. Ma mère et mon père m’accompagnaient. Ma mère a ouvert le bal avec un malaise vagal, trop de chaleur, trop d’émotion. Nous sommes ensuite rentrés dans la salle, le chirurgien m’a expliqué ce qu’on allait me faire. Sûr de moi, j’écoutais, posais des questions jusqu’à ce que, très soudainement, moi aussi, je court-circuite, c’en était trop pour moi, je déconnectais… Malaise vagal de quelques minutes. Le chirurgien préconisait une anesthésie générale pour l’intervention, au regard de mon émotivité un peu trop importante.

L’intervention a eu lieu la semaine suivante, finalement sous anesthésie locale avec un atarax ( ?) pour me calmer, je suis parti au bloc super détendu, et ai suivi mon opération dans un état semi-comateux, sans aucune douleur, ni pendant, ni après l’intervention.

Dans les jours qui suivirent, la cortisone et la tonne de médicaments qu’on m’administrait pour sauver ce qui restait de ma fonction rénale me fatiguaient, mais pas autant semble-t-il que la maladie elle-même : mi-octobre, j’étais crevé, les 10m qui séparent ma chambre de mon salon étaient parfois un obstacle insurmontable, j’étais tout vert, nauséeux toute la journée, je ne dormais plus, ne mangeais plus, faisais des cauchemars épouvantables lorsque mes yeux arrivaient à se fermer (alors que cela ne m’arrive jamais en temps normal), bref, plus rien ne fonctionnait chez moi, mes reins ne fonctionnaient plus, j’étais empoisonné à l’urée, avec un taux de potassium très élevé, enfin, que des indicateurs bien au rouge… J’ai tenu quelques jours comme ça. Après que la rétention d’eau due à l’insuffisance rénale (+cortisone ?) m’ait fait prendre pas mal de kilos, j’en ai reperdu 13 en 13 jours et me suis traîné jusqu’à l’Hôpital, le lendemain de mon anniversaire de 29 ans, le 22 octobre donc, pour demander qu’on me trouve une solution. Mon médecin m’a indiqué que mon opiniâtreté avait touché ses limites et qu’il était temps de passer à la dialyse pour reprendre un semblant de vie normale. Là, comme à beaucoup d’entre nous, le ciel m’est tombé sur la tête. Je n’ai jamais rien voulu savoir de ce traitement, je me suis figuré que l’on me l’épargnerait puisque l’on me suivait depuis tellement longtemps avec la quasi-certitude que l’on aurait le temps de prévoir une greffe…

Tout faux, tout s’est précipité sans que personne ne l’ait finalement anticipé. J’ai donc eu un jour, le 24 octobre, pour comprendre ce qui allait m’arriver. Je me suis rué sur Internet, et ai fini bien entendu sur le site d’Yvanie, où, pour être franc, j’ai interprété la description que j’y trouvais de la dialyse comme ma mort certaine, qui plus est, dans la douleur, avec même pas la compensation de reprendre un régime alimentaire normal !!! (En effet, au cours de mes dix années de maladie, j’ai enchaîne régime hyposodé puis hypoprotéiné, puis hyposucré, et en phase terminale, ” hypotout “, j’ai fait de l’anorexie tellement je n’arrivais plus à manger). Terrorisé, j’étais terrorisé, je ne sais même pas comment mon corps a résisté au niveau de stress que j’ai connu pendant ces quelques heures. Ma copine adorée, Anna, était pourtant à mes côtés, comme pendant toutes ces sales phases d’aggravation de la maladie, presque sereine, certaine en tout cas que la dialyse améliorerait mon état jusqu’alors piteux. Elle a passé des nuits la main sur mon front, seul remède qu’elle avait trouvé pour stopper mes tremblements. Bon bref, le 25 au matin, je me suis rendu au service de dialyse, en pleurs, en fait épuisé par la maladie, au bout du rouleau. Pourtant, je ne le savais pas encore, mais les temps à venir seraient finalement moins durs que les temps passés.

L’accueil au centre de dialyse de Necker s’est fait dans la bonne humeur des extraordinaires infirmières qui y officient, et du médecin qui y exerçait alors, Malik Touam, qui tenta de me rassurer sur ce qui allait m’arriver. Ma fistule, contrairement à ce que pensait mon néphrologue, n’était pas encore utilisable (elle avait seulement 3 semaines), et ma première dialyse se fit par cathéter fémoral. Là, chapeau à Malik, je n’ai strictement rien senti lors de la pose du cathéter, et rien senti non plus pendant mes 2 premières heures de dialyse. La machine était certes impressionnante de prime abord, mais bon, je ne la regardais pas trop et posais en revanche pas mal de questions pour comprendre comment elle fonctionnait. Le lendemain, re-belotte, dialyse, mais cette fois au régime standard de 4h. Pas de problème pendant cette deuxième séance, pas de douleur, quelques ” flottements “, mais rien de très désagréable. Le samedi en début d’après midi, je bénéficiais d’une ” permission ” pour rentrer chez moi, et aussi incroyable que cela paraisse compte tenu de l’état dans lequel j’étais juste deux jours avant, je me sentais bien, bien en forme, transformé, régénéré, ” reloadé ” comme diront mes copains ensuite de mon état en sortie de dialyse. Le lundi qui suivit, j’ai eu droit à un beau cathéter tunnelisé sur la poitrine. L’intervention là encore réalisée par Malik, s’est très bien passée, avec un demi lexomil. J’étais très détendu, et ne ressentais aucune douleur à proprement parler, l’anesthésie étant des plus efficaces. Je suis sorti de là un peu groggy, ma tête un peu tirée vers le bas par le cathé, mais il faudra seulement 3-4 jours pour que je m’y habitue et l’oublie (presque). Très vite, mon régime de croisière en dialyse s’est installé, toujours à Necker, les mardi, jeudi et samedi matins, tôt (7H30-11H30) pour me permettre de travailler le reste du temps. L’ambiance au sein de ce service était bonne, les infirmières et médecins qui s’y trouvaient, adorables, et rendaient bien moins pénibles ces longues heures que ce à quoi je m’attendais. Je me suis adapté et ai eu l’idée aussi géniale qu’onéreuse de m’acheter un lecteur DVD portatif qui transformera ces séances de dialyse en séances de ciné et feront de moi un cinéphile averti. Le temps est finalement passé assez vite. Les dialyses sous cathéter sont sans douleur, sans souci particulier. 3 semaines après ma première dialyse, on a ponctionné pour la première fois ma fistule. Re-stress la veille (quand j’étais plus jeune, une simple prise de sang pouvait me faire tourner de l’œil !!!) et pose très consciencieuse des patch Emla, anesthésiants locaux. Je n’ai lors de la première ponction quasiment rien senti grâce aux patchs, et par la suite, en posant religieusement mes patchs une heure au moins avant la ponction, je ne sentirai en général pas grand chose. La seule vraie douleur dont je me souvienne correspond à la première fois où ma fistule a ” claqué ” (c’est à dire que du sang s’est diffusé entre la peau et la veine), ce qui a généré un bel hématome, qui a, lui, été sacrément douloureux pendant quelques jours. Durant cette période on m’a dialysé sous machine montée en double pompe, permettant les ponctions avec une seule aiguille dans le bras, et ça s’est, là encore, bien passé, en dépit de mon stress à l’idée que l’on puisse approcher des aiguilles de mon bras tout gonflé et endolori par l’hématome.

Rares ont été les séances problématiques. J’ai eu au début de sévères crampes qui sont passées par la suite. J’ai aussi fait l’expérience de ce que la perte de plus de 1kg/heure excédait ma capacité et faisait chuter ma tension (pas très agréable). Une expérience désagréable aussi lors de mon voyage dans le sud de la France, à Antibes, pour les fêtes de fin d’année où la balance de ce centre (extra par ailleurs) n’était pas étalonnée comme celle de Necker, ce qui a fait que l’on m’a amené en dessous de mon poids sec, déclenchant des crampes terribles avec petit évanouissement à la clef. A part ça, j’étais en pleine possession de mes moyens cérébraux pendant les séances (ça paraît bête à dire, mais les gens qui ne connaissent pas se posent la question), en général bien détendu, au lit (parce qu’à l’hôpital, on est au lit alors qu’en centre, on est en général dans un gros fauteuil bien confortable), regardant des DVD, en général un film+une sitcom par séance. (après toute la série de Sex & The city, j’ai appris plus sur les femmes en 4 mois et demi de dialyse que pendant les 29 années qui avaient précédé !!!). L’idéal était d’arriver à dormir un peu, mais je n’avais pas dans ce domaine la même capacité que certains de mes compagnons d’infortune (certes, un peu plus âgés) qui dormaient du début à la fin de la séance…

Au final, la dialyse s’est avérée supportable physiquement, même si le plus dur fut la perte de liberté qu’elle implique, tout voyage étant compliqué, tout week-end étant amputé…De plus, j’ai eu pendant mes 4 mois et demi de dialyse un emploi du temps fort chargé, mon temps se répartissant entre dialyse, boulot et dodo pour récupérer. Ma fatigue a ainsi eu tendance à s’accroître pendant cette période, j’ai compris alors pourquoi on me disait que ce traitement était fatiguant. Côté boulot, mes extraordinaires copains et associés me laissaient une totale liberté de mon emploi du temps, et les jours où j’étais trop fatigué, j’avais la possibilité d’amputer mes journées (je ne l’ai finalement pas souvent fait, si l’on ne compte pas les deux demi-journées matinales que je consacrais à la dialyse elle-même). D’une manière générale, mon état de fatigue était directement lié au poids (d’eau) que l’on me faisait perdre au cours des séances. Lorsque j’avais environ 2 kilos, à perdre, je sortais en assez bonne forme et arrivais même à aller guincher la nuit dans la foulée. Lorsque je perdais 3 kilos et plus, la situation était plus compliquée…

Parallèlement à ce parcours de dialysé, le projet de greffe a toujours été présent. J’ai en effet eu la chance extraordinaire d’avoir une famille où les donneurs potentiels excédèrent (et largement) mon besoin, d’un ” seul ” petit rein fonctionnant. Au premier rang de ces donneurs bien décidés, ma maman, ma sœur jumelle Anne-Laure, mon papa mais aussi des oncles, tantes…qui ont manifesté cet accès ultime de générosité à mon endroit. Il fallait donc choisir ” l’heureux ” élu et dès décembre 2003, nous rencontrions en famille le Professeur Kreis, de Necker, pour s’entretenir de ce projet. Et c’est ma sœur jumelle qui, aux yeux de celui-ci, emportait l’affaire et devait ensuite se soumettre aux examens du bilan pré-greffe.
Sans les énumérer tous, les examens la concernant s’avéreront peu pénibles, en tout cas pas douloureux, et seront bouclés en deux passages à l’hôpital, en janvier 2004. Les résultats feront état d’une fonction rénale en parfait état, d’une bonne compatibilité HLA (4/6 pour les connaisseurs), et bien sûr, avant tout, d’un rhésus identique, O+. Ma sœur a toujours manifesté son accord pour être donneuse pour moi, depuis le diagnostic de ma maladie. Il me semble que la perspective de possibles années d’attente pour avoir un greffon sur donneur décédé, ainsi que la contrainte représentée par la dialyse et la fatigue que ce traitement provoque, l’ont convaincue que son don était pour moi mais aussi pour toute la famille, la meilleure des solutions. Notre gémellité nous a toujours rendus extrêmement proches, et cette récente aventure nous a probablement (encore un peu plus) rapprochés. Pour moi, même si pendant longtemps, la simple évocation du mot ” greffe ” suffisait à me faire fondre en larmes en pensant à ce que cela impliquait pour elle, sa détermination et sa force m’ont permis d’accepter son geste. Tout le monde imagine assez bien ce que représente la force de décider de donner, on mesure en revanche peut-être moins bien les appréhensions qu’il y a à accepter. Bon, mais ne perdons pas de vue l’essentiel, elle est mon héros, pour la vie, et rien que pour elle, je souhaite du fond du cœur une très longue vie à ma greffe !!!

Je me suis collé aussi de mon côté au bilan pré-greffe, pas bien contraignant, à l’exception de ce pénible examen qu’est la cystographie. Réalisée à 17H, alors que le médecin voulait finir sa journée et n’a pas pris trop longtemps pour laisser agir l’anesthésie, j’en garde un fort mauvais souvenir.

A la mi-février, les bilans étaient tous bouclés et ma sœur comme moi étions impatients de savoir quand nous pourrions enfin nous débarrasser de cette échéance un peu lourde. Fin février, nous attendions donc un coup de fil de l’infirmière coordinatrice, Catherine, qui devait coordonner l’agenda du chirurgien, la disponibilité du service…Et c’est le lundi 1er mars que nous apprîmes que l’intervention était planifiée pour le 9 mars !!! Nous avons un peu été pris de cours, mais heureux de nous débarrasser si vite de l’opération.

Le 8 mars, nous sommes rentrés tous deux à l’hôpital, dans des services différents, Anne-Laure en ” transplantation ” et moi en réanimation/soins intensifs. L’après midi a été consacrée à ce que je croyais être ma dernière dialyse avant la greffe. Cette séance fut la première (et la dernière) à laquelle assistèrent mes parents, ma sœur et ma copine. Ma copine resta peu impressionnée par la machine (qu’elle avait déjà entr’aperçu lors de ma première dialyse à Necker), ma sœur ” surprise ” ( ?) par la machine, ma mère et mon père un peu plus impressionnés. Je crois que ça doit être particulièrement difficile pour des parents de voir leur enfant relié à une machine par des tuyaux tout remplis de sang, je ne leur aurais d’ailleurs jamais imposé ce spectacle mais les évènements les y ont amenés, finalement.

Le mardi matin, le matin de l’opération donc, j’étais, au début du moins, assez détendu. J’ai appris pendant mon parcours, à faire confiance à la chimie pour gérer correctement mon niveau de stress et de douleur, cette seule confiance me permettant d’affronter plus sereinement ce type d’épreuve. Réveil tôt, vers 6H, douche à la bétadine, épilation soignée puis attente. Vers 8H, le médecin est passé et a demandé à ce que l’on me dialyse à nouveau une heure pour faire baisser mon taux de potassium qui avait eu tendance à regrimper pendant la nuit. A 8H20, j’entendis que ma sœur partait au bloc (le brancardier descendu la chercher voulait m’emmener moi, mais le médecin qui veillait alors à l’entrée de la chambre, l’a convaincu de ce que la donneuse, c’était ma sœur, et que c’était elle qui devait partir au bloc en premier !!). S’ensuivirent presque 3 H pendant lesquelles les (par ailleurs très sympathiques) jeunes infirmières tentèrent (finalement en vain) de me dialyser, ponction ratée de ma fistule qui claque, machine montée en simple puis double pompe, ne fonctionnant pas, changement de machine, plus le temps de dialyser… A ce moment là, on a touché mes limites de résistance, et je me suis vraiment énervé contre tout ce ” bordel “, le matin même de ma greffe. Le grand chef est passé dans ma chambre, constatant que c’était un peu la panique, et trouvant que je n’étais pas assez ” médicalisé ” (à quoi je répondais que je n’étais pas stressé mais salement énervé) et proposa finalement qu’on substitue à la dialyse pour laquelle, à 11H20, on ne disposais plus de beaucoup de temps, un lavement au ” kayexalate ” (imprononçable et inorthographiable pour moi) dont je vous épargne le détail, efficace cependant, et archi-rapide. A 11H30, je suis parti au bloc à mon tour, ” médicalisé “, c’est à dire un peu drogué.

Lorsque je suis rentré au bloc, on m’a informé de ce que ma sœur allait bien, grand ouf de soulagement, puis j’ai eu droit à une piqûre à la main pour poser une perfusion, enfin je ne me souviens que d’avoir vu un masque s’approcher de mon visage, une voix me disant : ” respirez Mr Gauthier “, et là, le trou, avant même la fin de la phrase, j’ai trouvé ça génial.

Deux heures et quelque plus tard, j’ouvrais les yeux en salle de réveil, à peine arrivé paraît-il, à côté de ma sœur qui était, elle, bien réveillée. Une petite pompe à morphine dans la main, je devais juste gérer ma douleur. Ma sœur avait déjà plus mal que moi, et consommait plus de morphine, sans que la douleur soit, semble-t-il, insoutenable. Quelques nausées pour chacun d’entre nous mais rien de bien sérieux, on peut dire que nous avons eu un réveil des plus doux.

Au terme des six heures légales de présence en salle de réveil, ma sœur fut ensuite emmenée en service d’urologie, tandis que l’on m’emmenait, un peu plus tard, en soins intensifs.

Pour ma sœur, le trois premiers jours furent pénibles, et après qu’elle eût un peu d’appréhension à solliciter sa pompe à morphine, elle lui fit finalement confiance pour soulager ses douleurs, tout en absorbant sous perfusion la dose maximale du très efficace perfalgan. Je ne l’ai pas vue pendant ces trois jours. De mon côté, ça allait plutôt bien, la douleur n’était pas importante, je n’ai quasiment pas pris de morphine, j’ai en revanche pris mes 3g de perfalgan/jour. Dès le deuxième jour après la greffe, je faisais les quelques pas qui me séparaient de mon cabinet de toilette pour me débarbouiller un peu. J’avais pas mal de tuyauterie gênant mes déplacements (une perfusion à chaque bras, une sonde urinaire), mais j’étais plein de courage pour supporter tout cela sans sourciller puisque mon nouveau rein fonctionnait fort bien, que ma créatinine, à plus de 700 avant l’opération, baissait de près de 100 points/jours et que je pissais (sans vraiment m’en apercevoir à cause de la sonde) près de 3 l/jour. Tout était donc au vert et j’attendais avec impatience de rejoindre ma sœur dans une chambre qu’on nous avait réservée en service de transplantation.

Ce fut chose faite le samedi (rappel : opération le mardi) où l’on se retrouva pour partager nos quelques souffrances résiduelles, mais surtout notre rémission. J’ai été ” débranché ” de toute ma tuyauterie le samedi, Anne-Laure l’avait été le jour précédent. Dès le dimanche, je crois que l’on marchait tous deux, doucement certes, mais quand même. On a été libéré le mercredi, tous deux ensemble, de l’hôpital, soit 8 jours seulement après la transplantation.

Un mois et demi après la transplantation, ma sœur va très bien, et moi aussi. Ma créatinine n’est pas encore parfaite, probablement en raison d’un petit problème de tuyauterie (une légère sténose sur l’urétère), mais qui semble aller en s’arrangeant puisqu’elle continue, tranquillement de baisser. Je ne connais pas vraiment d’effets secondaires gênants pour ma médicamentation (protocole Rapamune+prograf), même si j’ai dû freiner le sucre qui me donnait pas mal d’acné (j’ai pourtant fini ma puberté il y a assez longtemps), mais sucre et traitement ne font semble-t-il pas bon ménage chez moi. Je suis astreint à deux passages par semaine à l’hôpital minimum, un pour les examens de sang, un pour la consultation, mais cela me semble dérisoire par rapport à la contrainte de la dialyse.

Au final, je souhaitais avec mon témoignage redonner un peu de confiance à ceux qui connaissent les mêmes épreuves, on m’avait souvent dit que ça s’arrangerait, mais il est vrai qu’à certains moments on peut avoir du mal à y croire. La greffe, avec mon faible recul certes, semble une extraordinaire ” solution ” pour les insuffisants rénaux et j’espère que le plus grand nombre des concernés pourra, comme moi, en profiter.

Enfin, je me tiens à la disposition électronique de ceux qui pourraient souhaiter quelques informations particulières sur la parcours dialyse/greffe, je sais combien on recherche des informations rassurantes dans ces moments, et mon expérience, je l’espère, pourra peut-être en fournir à quelques-uns.

Vincent Gauthier

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