La greffe au féminin : suivi gynécologique et contraception
La contraception après la greffe
Les femmes greffées témoignent très souvent de leurs difficultés à obtenir une information complète sur leurs possibilités de contraception.
La contraception est un sujet important et pourtant négligé
Après la greffe, les grossesses sont possibles, mais elles doivent être programmées et anticipées, notamment en adaptant le traitement antirejet. En effet, les grossesses non programmées chez les femmes greffées ont un risque élevé de complications, tant pour la mère (fausses couches, hypertension artérielle, dégradation de la fonction du greffon) que pour l’enfant à naître (malformations, retard de croissance intra-utérin, prématurité). Les dernières recommandations de la Haute Autorité de Santé (HAS) abordant la contraception des femmes greffées datent de 2007. Les pratiques ont depuis évolué, et les modes de contraception se sont diversifiés.
La contraception doit être adaptée à chaque femme : cette mise au point n’a pas pour but de faire un panorama exhaustif de toutes les données scientifiques et ne saurait remplacer une consultation avec un médecin.
Après la greffe, la modification des traitements pris par les patientes et notamment les antirejets nécessitent une consultation gynécologique spécifique qui permettra notamment de faire le point sur la contraception. Celle-ci devrait être ensuite réévaluée, et adaptée en fonction de sa tolérance et de l’évolution de la situation de la patiente.
Un suivi gynécologique régulier est ensuite conseillé. En raison du risque accru de cancer du col de l’utérus, il devrait en particulier comporter un frottis cervico vaginal par an.
A. LES METHODES CONTRACEPTIVES HORMONALES
Les hormones utilisées pour la contraception sont de 2 types : progestatives et oestro-progestatives (les oestrogènes sont toujours utilisés en association avec les progestatifs).
1. Contraception oestro-progestative: par voie orale (pilule), par patch ou anneau vaginal
- Elle est contre indiquée au-delà de 35/40 ans et en cas de facteurs de risque cardio-vasculaires : diabète, tabagisme, hypertension artérielle, présence en excès de lipides dans le sang (hypercholestérolémie, hypertriglycéridémie), anomalie de la coagulation, ainsi qu’en cas d’ d’accidents vasculaires veineux (phlébites, embolies pulmonaires) et artériels
- Les femmes ayant eu une hémodialyse prolongée ont des facteurs de risque vasculaires plus importants. Les oestro-progestatifs sont donc à priori contre-indiqués chez elles
- Elle est rarement prescrite chez les femmes greffées du cœur
- Elle peut modifier le métabolisme de certains antirjets, tels que la ciclosporine, le sirolimus, les corticoïdes et le tacrolimus (augmentation de la concentration dans le sang). C’est pourquoi en cas de prise de pilule oestro-progestative, une surveillance rapprochée de ces taux doit être effectuée
- Compte tenu de ce contexte (risque vasculaire et intéractions possibles avec les autres traitements), la contraception oestro-progestative n’est habituellement pas utilisée chez les femmes greffées.
2. Contraception par progestatifs : par voie orale ou par implant sous cutané
- Elle est possible en cas de risque vasculaire élevé et notamment chez les femmes hémodialysées
- C’est la méthode de contraception orale la plus couramment utilisée chez les femmes greffées
- Le plus souvent, en France, c’est un macro progestatif qui est prescrit : l’acétate de chlormadinone (Luteran®, et ses génériques)[2]. Plus rarement et dans certaines indications, l’Androcur avec un oestrogène en gel ou en patch peut être utilisé
- Ce peut être aussi un micro progestatif par voie orale (Cérazette®, ou ses génériques, desogestrel, Antigone® ou Microval®) ou en implant (Nexplanon®)
B. LES METHODES CONTRACEPTIVES MECANIQUES
1. préservatifs masculins : ils ont l’intérêt de protéger des maladies sexuellement transmissibles
2. préservatifs féminins : leur coût relativement élevé en restreint l’emploi. Ils protègent aussi des maladies sexuellement transmissibles
3. diaphragmes + spermicides : peu utilisés en France, demandant un apprentissage et souvent considérés comme astreignants, ils peuvent offrir une solution quand les autres méthodes ne sont pas tolérées
4. stérilets : la prise d’antirejets (surtout des corticoïdes) pourrait potentiellement augmenter le risque de complications infectieuses. C’est probablement pourquoi ils sont encore peu prescrits en France chez les femmes greffées
- Stérilets au cuivre
- Stérilets délivrant de la progestérone (Mirena®, Jaydess ®) : ils sont parfois prescrits chez les femmes greffées, en particulier chez celles qui ont des règles abondantes ou des saignements entre les règles
C. LES METHODES DE CONTRACEPTION DEFINITIVE
1. Stérilisation tubaire
Il s’agit de la pose par voie naturelle de deux ressorts dans les trompes, sans anesthésie générale : dispositif intra-tubaire (Essure®). Cependant il n’est pas indiqué en cas de traitement par corticothérapie car il risque de ne pas être efficace.
2. Ligature de trompes sous cœlioscopie : elle nécessite une anesthésie générale et consiste en la pose d’anneaux sur les trompes soit en une ligature/section des trompes.
3. Vasectomie : c’est une méthode de contraception définitive de l’homme. Elle consiste en une ligature/section des canaux déférents, petits canaux qui ont pour rôle de conduire les spermatozoïdes dans le sperme. Elle est généralement faite sous anesthésie locale. Il faut attendre au moins 12 semaines après l’opération pour qu’elle soit efficace.
[1] Recommandations professionnelles « Suivi ambulatoire de l’adulte transplanté rénal au de là de 3 mois après transplantation ». Page 132. Haute Autorité de Santé, novembre 2007.
[2]Gynecologic follow up of 129 women on dialysis and after kidney transplantation: a retrospective cohort study. Chakhtoura Z et al. Eur J Obstet Gynecol Reprod Biol. 2015 Apr;187:1-5.
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Cet article a été mis à jour début 2017, dans le cadre d’un groupe de travail impliquant notamment les Docteurs Zeina Chakhtoura et Isabelle Heard et
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