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Jean-Manuel : mes rognonades…

Chers Amis insuffisants rénaux,

Ce titre évocateur n’est pas le nouveau nom d’un enième bouquin de recettes de cuisine (sic !) mais un témoignage de mon long parcours fléché dans le ” fabuleux ” royaume de l’IRC….. Voyage digne du film ” L’aventure interieure ” ! A défaut de vous souhaiter bon appétit, lisez-le tout de même avec gourmandise et régalez-vous !

Mais, tout d’abord, faisons les présentations.

Je me nomme Jean-Manuel Bessé et je suis âgé de 32 ans depuis le 27 février 2004. Je suis né à Nantes. Mon insuffisance rénale a été diagnostiquée vers 2 ans et demi, après différents examens réalisés d’abord à Nantes puis à Paris (Armand Trousseau), pour une biopsie du parenchyme rénal. L’étiologie de mon insuffisance rénale est une malformation des deux reins (taille 5cm au lieu de 12 cm) avec un nom un peu barbare : hypoplasie rénale bilatérale oligoméganéphronique (néphrons en nombre insuffisant et de très grande taille, 200000 ou 300000 au lieu de 1.000.000) Après cela, on m’a dirigé en 1975 vers ” la Mecque ” de la néphrologie pédiatrique de l’époque, Necker-Enfants Malades.

A partir de là, ma longue histoire de patient chronique a véritablement démarré. Au début, cela se résumait essentiellement par une consultation annuelle puis bisannuelle avec le Dr Marie-France Gagnadoux, avec examens sanguins et urines de 24h, histoire de suivre son évolution. Ensuite, il y eu la mise en place de différents protocoles de contrôle de ma fonction rénale résiduelle. En théorie, le corps médical avait prévu le stade de l’IRCT vers l’âge de 10 ans mais ma famille, très au fait de la chose (mon Grand-Père maternel était à cette époque médecin généraliste), a réussi à retarder l’échéance fatidique de 8 ans, en me faisant suivre un régime hypoprotidique.

J’ai donc commencé à dialyser, après la création de ma première fistule radiale, dans le service adultes de Necker, chez le Pr Jean-Pierre Grünfeld, en août 1990. Puis, après quelques séances et une stabilisation de mon état, j’ai quitté le service et j’ai intégré le centre d’hémodialyse lourd de la Clinique de l’Alma, en septembre 1990. J’y suis resté quelques séances avant de partir en formation à l’hémodialyse, dans l’unité d’autodialyse de l’Alma, un appartement médicalisé, substitut de l’HD à domicile.

A partir de cette époque, une toute nouvelle vie s’est offerte à moi ! En effet, en raison de mon long parcours de malade chronique, qui avait commencé depuis ma plus tendre enfance et les moqueries et railleries de mes compagnons d’école, j’avais très tôt pris conscience de ma différence physique (à cause de mon IRC, j’était menu et de petite taille, avec une maturation sexuelle retardée, à l’âge pubertaire) et je m’étais peu à peu marginalisé contre mon gré vis-à-vis d’eux et la société en général. Or, quand mon traitement dialytique en autodialyse a démarré, j’ai tout à coup vu des gens aussi atteints que moi dans leur chair et cette réalité m’a tout de suite fait sortir de mon isolement.

Par ailleurs, la dialyse fut pour moi une renaissance sur le plan physique et psychique car elle favorisa, à cette époque, mon épanouissement en permettant de traiter concrètement certains symptômes invalidants comme l’anémie, par injection d’EPO et j’ai eu la possibilité de rencontrer et de tisser des liens forts avec la plupart de mes compagnons d’infortune et l’équipe soignante, qui constitue aujourd’hui ma deuxième famille.

Encore maintenant, j’ai toujours autant de plaisir à les fréquenter trois fois par semaine et même si je suis un jour transplanté, je ne les oublierai jamais. Mon ” CLUB ” fait désormais partie de ma vie. Parallèlement à cette réalité, mes presque quinze années de traitement itératif m’ont permis de constituer avec le temps, un réseau national de relations amicales dans l’univers de la néphrologie, en voyant régulièrement des spécialistes reconnus, à l’occasion de congrès ou d’événements divers, touchant à l’IRC.

En ce qui concerne mes deux tentatives de greffes rénales, elles se sont toutes les deux soldées par des échecs rapides, à J+2 et J+1.

La première, le 10 mai 1992 à Necker, a capoté à cause d’un staphilocoque doré qui a provoqué, après l’intervention, un rejet suraigu et un choc septicémique (“Toxic Choc Syndrom”) avec une température à 41,5°C et un début de confusion mentale.

J’ai subi une détransplantation du greffon deux jours après. La deuxième greffe s’est déroulée à Nantes, le 24 novembre 1999, après m’être inscrit sur la liste prioritaire (80% d’anticorps anti-HLA depuis l’échec de ma précédente greffe…..). Elle a échouée 8h après l’opération, par la rupture de la suture en surjet entre l’anastomose de la veine cave du greffon et mon artère illiaque. Après concertation de l’équipe médico-chirurgicale et aucune solution de ratrapage, il a été décidé de retirer le rein greffé. Depuis cette époque ralativement mouvementée, je me suis réinscrit sur la liste nantaise du Pr Jean-Paul Soulillou, presque aussitôt, vers le 15 janvier 2000. Ils ont failli me greffer le 18 juin 2003, mais en sortant le rein de la glacière, le chirurgien, lors de la préparation de l’organe, a décelé un anévrisme artériel important sur le hile du greffon (dysplasie) et un gros risque hémorragique, à court terme. Je n’ai donc pas été incisé et je ne suis resté qu’une heure et demie sur le ” billard ” et deux jours dans le service. Je reste inscrit en HLA prioritaire, à ce jour. Mais je ne suis pas pressé. J’attends de nouveaux progrès significatifs en matière de tolérance antigénique (induction de tolérance) et de diminution d’effets secondaires des différentes molécules immuno-suppressives. Patience, Patience…

Par ailleurs, mon vécu d’insuffisant rénal a été émaillé de petits problèmes en tout genre, au plan néphrologique mais surtout neurologique. En décembre 1998, lors de vacances de Noël à La Baule, j’ai été la proie de ce que l’on appelle un “état de mal convulsif”, en pleine séance de dialyse, en U.A.D, à Saint-Nazaire. J’ai tout d’abord poussé un cri et j’ai convulsé puis j’ai perdu connaissance. Après intervention du Samu, je me suis retrouvé en réanimation au CHR de Saint-Nazaire pendant trois semaines, dans un état de coma stade 3 pour un long voyage dans les méandres de ma conscience. Puis je me suis réveillé, à grande surprise de ma famille. Une “hypervolémie encéphalique” a été diagnostiquée (trop d’eau dans le cerveau par une prise de poids inter-dialytique trop forte : œdème cérébral) A la suite de ce “drôle” d’événement, mon infirmière de dialyse n’a pas dormi durant une semaine et je ne manque pas de le lui rappeler à chaque occasion de ma présence… J’ai mis du temps à remonter la pente après une longue periode d’hospitalisation en Néphro, à Necker, qui a duré 5 mois (l’année 1999 est considérée comme un “grand cru classé”, de ce point de vue).

Ma renaissance, en 2000, a eu comme point de départ, un voyage à New-York, en mai 2000, qui m’a véritablement transformé. J’ai ensuite entrepris une rééducation de plus d’un an, avec une prise en charge par un service de neurologie. Suite à cette situation qui a bien failli être irréversible pour m’envoyer en Enfer, j’ai repris mes dialyses en centre lourd, à l’Alma, durant 1 an et quelques mois, afin de me “remplumer”.

Aujourd’hui, j’ai réintégré depuis 2001 mon unité habituelle d’autodialyse et mon traitement, mis à part quelques “bricoles” mineures, se déroule sereinement. Pour mon épanouissement personnel et mon attachement au savoir, j’ai rejoint un groupe amical constitué d’adhérents de la FNAIR en janvier 2003, afin de servir mes semblables.

Dans cette optique, je considère que chaque dialysé ou transplanté doit prendre son traitement à bras le corps et s’informer au maximum sur les différentes alternatives de prises en charge de l’IRC ou l’IRCT et les nouveaux progrès, afin d’améliorer sa qualité de vie, son épanouissement personnel, social et sa vie professionnelle et être en mesure de combattre l’adversité à armes égales.

Surtout ne vous découragez pas ! Il faut relativiser ! Bien d’autres pathologies, respiratoires ou neurologiques, sont bien plus invalidantes que l’IRC ou l’IRCT…

Même dialysé(e), la vie vaut bien la peine d’être vécue !

Soyez combatifs ! Vous en serez que mieux récompensés et l’avenir sera salvateur.

En tout cas, je vous salue bien et Chapeau bas les IRC !

Jean-Manuel Bessé.

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